Patrimoine et identités dans les sociétés européennes: stéréotypes, émotions et expériences
Descriptif :
Ce colloque propose d’interroger, grâce à une approche transdisciplinaire et transnationale, les processus de patrimonialisation, la place et le rôle du patrimoine dans des sociétés multi-niveaux dans lesquelles interagissent des identités étatiques et non étatiques. Le patrimoine culturel a traditionnellement fonctionné, dans les sociétés européennes, comme un mécanisme d’identification collective, même si cela n’a pas toujours entraîné un consensus unanime. Nous allons aborder la question du lien entre patrimoine et identités dans les sociétés européennes depuis la perspective des stéréotypes, des émotions et des expériences. Outre le rôle clé que les stéréotypes sont amenés à jouer dans la construction de « l’autre », en tant que complément nécessaire du « nous » fondant les identités nationales, les stéréotypes sont aussi au coeur de la construction de « l’auto-image » qui sert de support à toute identité collective, qu’elle soit nationale ou d’une autre nature. Ainsi, pour comprendre comment la construction de ce qui fait patrimoine s’articule avec les processus de construction identitaire, il convient de s’interroger sur l’influence des stéréotypes dans les processus de patrimonialisation au niveau local et global mais aussi dans le processus de réception de celui-ci. Les émotions constituent, elles aussi, une variable essentielle dans l’analyse des identités nationales et des processus de construction identitaires qui y sont associées. Le vivre-ensemble dans la société s’alimente d’émotions partagées, que ce soit à travers un destin commun originel ou à travers une communauté d’appartenance construite. Le fondement même de l’identité, le sentiment d’appartenance, met à l’oeuvre le ressenti de l’individu par rapport au groupe auquel il se sent rattaché. Les spécificités de la construction identitaire de groupe reposent en partie sur les affects que ressentent les personnes formant le groupe. Si l’on considère que le patrimoine peut être un élément fédérateur, ou au contraire un élément de division, il est déterminant de comprendre comment les émotions peuvent représenter une variable essentielle dans la construction de ce qui fait patrimoine à l’échelle locale et globale. Pour que le patrimoine puisse être un élément de construction identitaire il est nécessaire de créer une interaction entre les personnes et leur environnement afin que celles-ci puissent adhérer au récit patrimonial qui leur est offert. Cette « fiction » patrimoniale ne peut exister que dans le dialogue entre le dedans et le dehors mais aussi dans la relation à autrui, l’expérience partagée. Afin de mieux comprendre l’articulation entre les processus de patrimonialisation et de construction des identités nationales, il convient d’étudier les mécanismes d’élaboration de cette expérience partagée, de cette « fiction » vécue et interprétée.
– Géraldine Galeote, rapporteure et modératrice (Université de Nantes)
– Alexandre Kostka (Université de Strasbourg)
– Jesús Alonso Carballés (Université de Bordeaux)
– Marta Garcia Carrion (Universitat de València)
– Eduardo Ruiz Vieytez (Universidad de Deusto)
Questions :
Le Conseil de l’Europe a élaboré une stratégie pour le patrimoine culturel en Europe au XXIe siècle, basée sur la Déclaration de Namur de 2015 et la Recommandation CM/rec(2017) 1 adoptée le 22 février 2017. La composante sociale de cette Recommandation a trait aux relations du patrimoine avec les sociétés, la citoyenneté, la transmission et le partage des valeurs démocratiques par des méthodes de gouvernance participative et la bonne gouvernance au moyen d’une gestion participative. Elle recommande, en particulier, de s’appuyer sur le patrimoine pour affirmer et transmettre les valeurs fondamentales de l’Europe et de la société européenne. Elle indique ainsi que : « Dans toute sa richesse et sa diversité, le patrimoine culturel peut contribuer, au-delà des particularités nationales, régionales ou locales, à forger et à développer chez les citoyens européens un sentiment d’appartenance et d’histoire communes, en rapport avec les valeurs européennes essentielles que sont l’humanisme et la démocratie ». Le patrimoine, qui est la représentation d’une identité singulière, pourrait-il être finalement le résultat de la circulation de stéréotypes culturels créés par la volonté politique, que le processus de stéréotypisation soit initié à l’extérieur de la société dont fait partie le patrimoine étudié ou à l’intérieur même de cette société ? Et si tel est le cas, quelles seraient les pistes pour déconstruire cela afin que le patrimoine soit une représentation réelle et non stéréotypée des identités ?
Le stéréotype pourrait-il être une grille de lecture de la diversité patrimoniale qui fasse sens pour créer un sentiment d’appartenance et d’histoire commune dans les sociétés européennes ou bien, au contraire, met-il en exergue les différences en soulignant les traits distinctifs ? Finalement, quel peut être le rôle du stéréotype dans la dialectique entre patrimoine et diversité.
– Maitane Ostolaza, rapporteure et modératrice (Université de Nantes)
– Fabienne Colombel (Université de Nantes)
– Charlotte Barcat (Université de Nantes)
– Frédéric Gracia (Université de Nantes)
Questions :Le patrimoine s’est révélé être historiquement un élément efficient de nationalisation. Sa naissance est associée à l’émergence des nations modernes et à la formation des imaginaires collectifs en lien avec de nouvelles identités transcendantes. En ce sens, nous pouvons affirmer que le patrimoine (quelle que soit sa nature, qu’il s’agisse d’un monument, d’un paysage, d’un rite, d’un corpus documentaire), joue un rôle clé en tant que symbole sensible d’une communauté d’appartenance ; un symbole qui agit en outre à un double niveau. D’une part, le patrimoine renvoie à l’identité collective qu’il incarne et qu’il contribue à consolider. D’autre part, il facilite la subjectivation de cette identité collective par l’appropriation de l’objet patrimonialisé par l’individu. Tel que l’a mis en exergue l’anthropologue Daniel Fabre, c’est dans cette double dimension du patrimoine, individuelle et collective, que sont produites, vécues et exprimées les émotions. A partir de ces considérations, il conviendra d’évaluer la pertinence d’incorporer les émotions comme perspective d’analyse appliquée aux processus de patrimonialisation et, en particulier, aux modes de réception et d’appropriation du
patrimoine comme élément d’identification collective. L’analyse du patrimoine depuis la perspective des émotions pourrait-elle permettre de comprendre les liens entre patrimoine et identités territoriales (indépendamment de l’échelle d’application et des cadres culturels de référence) ?
Finalement, comment pourrait-on étudier les émotions en lien avec le patrimoine ? Quelles sources pourraient permettre d’analyser cette question ? Comment pourrions-nous interroger ces sources ?
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